Le 26 septembre 2024, l’administration fiscale a publié ses commentaires sur l’article 774 bis du Code Général des Impôts (CGI). Cet article encadre les dettes issues de certains quasi-usufruits, en précisant les conditions dans lesquelles elles peuvent être déduites de l’assiette successorale.
Contexte et objectif
L’exécutif a introduit l’article 774 bis pour encadrer la déduction des dettes issues d’un quasi-usufruit dans les successions. Ce texte s’applique notamment aux donations de sommes d’argent assorties d’une réserve de quasi-usufruit.
L’objectif est de limiter les montages fiscaux principalement motivés par une réduction des droits de succession, tout en préservant les opérations légitimes à finalité patrimoniale ou familiale.
Usufruit et quasi-usufruit : définitions simplifiées
Pour mieux comprendre les implications de cet article, il est essentiel de revenir sur les notions d’usufruit et de quasi-usufruit :
- Usufruit : L’usufruit permet à une personne d’utiliser un bien appartenant à un autre (le « nu-propriétaire »). Par exemple, un usufruitier peut habiter une maison ou percevoir les loyers d’un appartement, mais devra restituer le bien au terme du contrat.
- Quasi-usufruit : Ce régime s’applique aux biens « consommables » comme l’argent ou les stocks. L’usufruitier peut utiliser ces biens ou les dépenser, mais devra les restituer en fin de contrat, sous forme d’une somme équivalente ou d’autres biens de même nature.
Exemple pratique : Lors d’une succession, si le conjoint survivant hérite de l’usufruit des comptes bancaires, il peut dépenser librement ces liquidités. En contrepartie, les héritiers nus-propriétaires détiennent une créance sur sa succession.
Principales mesures de l’article 774 bis
- Dettes non déductibles :
Les dettes issues d’un quasi-usufruit volontaire, c’est-à-dire résultant d’une décision personnelle de l’usufruitier (comme une donation assortie d’une réserve de quasi-usufruit), ne sont pas déductibles de l’actif successoral. - Dettes exclues de la non-déductibilité :
Les dettes imposées par des circonstances légales ou patrimoniales (usufruit légal du conjoint survivant, par exemple) ne sont pas concernées par cette disposition. - Preuve à fournir :
Si l’opération est contestée, il appartient au contribuable de prouver que la dette de quasi-usufruit n’a pas été contractée dans un objectif principalement fiscal.
Exemple pratique : Une dette née de la cession d’un bien immobilier démembré (avec report de l’usufruit sur le produit de la vente) pourrait être non déductible, sauf si le contribuable démontre que l’opération avait une finalité patrimoniale et non fiscale.
Clarifications apportées par l’administration fiscale
Pour mieux comprendre comment cet article s’applique concrètement, l’administration a détaillé plusieurs critères et exceptions dans sa mise à jour :
- Critères d’évaluation :
Pour démontrer qu’une opération n’a pas d’objectif principalement fiscal, plusieurs éléments peuvent être pris en compte, tels que :- Le délai entre la donation et la cession du bien.
- Les raisons patrimoniales ou familiales justifiant l’opération.
- La liberté de l’usufruitier dans la gestion des biens concernés.
- Exceptions :
Certaines dettes de restitution restent déductibles de l’actif successoral. Par exemple :- Les dettes issues de l’usufruit légal du conjoint survivant.
- Les dettes liées à des avantages matrimoniaux ou à des contrats d’assurance-vie avec clause bénéficiaire démembrée.
Que faire si vous êtes concerné ?
Si vous avez déjà constitué un quasi-usufruit ou êtes concerné par une succession impliquant de tels montages, il est essentiel d’anticiper et de sécuriser votre situation. Voici les étapes clés à suivre :
- Analysez votre situation avec un conseil : Un professionnel pourra identifier si les dettes concernées sont potentiellement non déductibles et évaluer les preuves nécessaires pour justifier vos choix.
- Documentez vos décisions : Conservez des justificatifs démontrant que vos opérations ont une finalité patrimoniale ou familiale, comme des contrats ou des lettres d’intention.
- Envisagez des solutions adaptées : Selon votre situation, vous pourriez :
- Rembourser par anticipation les dettes concernées pour éviter tout litige futur.
- Transformer un quasi-usufruit en usufruit classique grâce à un investissement commun entre usufruitier et nu-propriétaire.
Conclusion
L’article 774 bis du CGI soulève des questions sur la fiscalité des successions et la déductibilité des dettes de quasi-usufruit. Si vous êtes concerné, il est essentiel de sécuriser votre situation avec un professionnel pour éviter tout contentieux.
Pour anticiper les impacts de cette nouvelle réglementation sur votre patrimoine, prenez rendez-vous. Nous vous aiderons à sécuriser vos choix et à optimiser votre stratégie successorale.
Pour aller plus loin
- Article 774 bis du Code Général des Impôts
- Articles du Code civil régissant l’usufruit : Code civil, articles 578 à 624
- Publication du 26 septembre 2024 au Bulletin officiel des finances publiques : BOI-ENR-DMTG-10-40-20-20